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Que ton oui soit oui, et ton non, non ; sinon tu sers de malins intérêts

mardi 21 février 2017, par :

Le décret contre les migrants pris par Donald Trump, le 27 janvier, ne cesse de susciter des réactions d’indignations au niveau international. A juste titre et c’est la moindre des choses. Il semble, comme c’était annoncé, que nous n’en ayons pas fini avec ce 45ème président s’il fait ce qu’il a promis. Souhaitons que des citoyens américains sauront mener les batailles nécessaires pour préserver les droits et la dignité de tous.
Par contre, et cela ne fait pas que ce soit plus acceptable, en ce qui concerne le traitements des exilés, Trump n’est que le résultat des politiques désastreuses menées ces dernières décennies par les gouvernements américains successifs. Politiques qui se résument que par des « coups » démagogiques qui ne résolvent en rien les situations humaines catastrophiques. Et ce qui se passe au Etats Unis est de même dans notre Europe.

Les Etats-Unis n’ont pas attendu Donald Trump pour mettre en place des politiques d’exclusion. Les pays nommés dans le décret du dit « Muslin Ban » du 27 janvier sont les pays identifiés par l’administration Obama en tant que sources du terrorisme et dont la sécurité intérieure appelait, il y’a à peine un an, en février 2016, à restreindre l’arrivée .[1] Il n’y pas eu à l’époque de manifestations indignés qui pourtant se justifiaient au même titre qu’aujourd’hui… Donald Trump a beau jeu de dire désormais « Ma politique est semblable à ce que le président Obama a fait en 2011 quand il a interdit les visas pour les réfugiés d’Irak pendant six mois ». Il rappelle ainsi que Barack Obama a effectivement interdit l’accès aux irakiens[2] dans une indifférence générale. De même lorsque fin 2015 Barack Obama a limité le nombre de réfugiés admissible en 2016 cela n’a pas non suscité de réactions alors que plus de la moitié des états de l’union (31 exactement ) ont déclaré publiquement et officiellement qu’ils se refusaient d’accueillir le moindre réfugié[3]… Désormais reste à savoir si Trump va essayer de faire mieux qu’Obama qui, malgré une baisse ces deux dernières années, est le président qui a le plus expulsé de migrants dans l’histoire américaine moderne[4] .
A défaut de nous positionner dans un « oui » ou dans un « non » en fonction des circonstances et des régimes, nous légitimons, de fait, des politiques incohérentes qui, outre les dégâts humains qu’elles occasionnent, inévitablement laissent la place à des sentiments de rejets qui s’expriment sans retenus tels ceux-ci émanant du président des Etats-Unis : « Certes nous sommes une nation d’immigrants .. mais nous sommes une nation qui a des lois. Notre nation est bouleversé par le grand nombre d’étrangers illégaux qui entrent ... Les immigrants illégaux prennent les emplois des citoyens ou immigrés légaux, ils imposent des charges sur nos contribuables ... Voilà pourquoi nous doublerons le nombre de policiers des frontières et expulserons en nombre comme nous ne l’avons jamais fait jusqu’à maintenant les immigrants illégaux … C’est un suicide pour notre nation que de permettre l’abus de nos lois sur l’ immigration comme cela a eu lieu au cours de ces dernières années .. Nous devons arrêter cela. » Ces propos[5] n’étaient pas de Trump mais étaient ceux du président démocrate Bill Clinton. Il venait de lancer la construction du mur que nous qualifions désormais « mur de Trump ». C’est George W. Bush, qui, à la suite de Bill Clinton, a finalisé la construction de 1100 km de « barrières physiques », fortement surveillées, pour empêcher les « entrées illégales ». Rappelons, pour l’anecdote, que des deux sénateurs démocrates de l’Illinois, l’un a voté « non » à ce mur, et que l’autre a par contre voté « oui ». Il s’agissait de Barack Obama deux ans avant d’être élu président des États-Unis. Parmi les 26 démocrates pour le mur il y avait aussi la sénatrice de l’Etat de New York Hillary Clinton. Soulignons aussi que le « mur de Trump » avant Trump cause la mort de 5000 personnes par an depuis deux décennies…
Tout cela, jusqu’à maintenant, n’a jamais provoqué beaucoup de réactions…
Alors, aujourd’hui, lorsqu’on voit le président français appeler au « respect » du principe de « l’accueil des réfugiés » et dire que « face à un monde instable et incertain, le repli sur soi est une réponse sans issue » nous pouvons être d’accord sur le fond des propos mais être surpris que lui-même les tienne.
En effet, la France fait partie des nombreux Etats qui mettent en place des mesures drastiques visant à empêcher les personnes d’arriver sur le territoire européen. Citons, entre autre, les milliers de personnes (bloquées parfois jusqu’à 26 jours) dans les zones « d’attentes » de nos grands aéroports avant[6] d’être expulsés dans une opacité mesuré. Ou encore les visas de transit aéroportuaire[7] auxquels est soumise la Syrie depuis 2013 ce qui empêche simplement de transiter par la France… Enfin, depuis mars 2016 la France a renforcé les sanctions aux transporteurs pour les inciter à ne pas embarquer d’éventuelles personnes qui pourraient être refoulés à l’arrivée, à la façon de ceux que nous avons vu dans les reportages, qui ont suscité notre légitime indignation, suite au décret de Trump… Ce n’est pas du Trump mais cela y ressemble fortement, occasionnant les mêmes dégâts humains, et incite les dirigeants de demain à aller plus loin…
Nous avons dans notre histoire, le traitement avant guerre de ceux que l’époque nommait officiellement les « indésirables ». Avec le recul il serait bien hasardeux d’analyser les politiques de Daladier et de Reynaud à la lumière de celle que Pétain allait mener en s’appuyant sur les outils entre autre les camps) déjà mis en place. A l’époque de façon volontariste les gouvernements de la IIIème république finissante ont essayé de faire face à l’urgence d’une conjoncture inattendue. Mais pour ne pas avoir su anticiper la conséquence de leurs gestes, ils ont permis que le régime de vichy récupère cet « héritage ».[8] C’est bien ce qui a fait dire au pasteur André Dumas lorsqu’il s’est interrogé par la suite sur la conduite que les organisations d’assistance aurait dû adopter : « C’est au début qu’il faut refuser de s’habituer pour que votre oui soit vraiment oui et votre non soit vraiment non.  »[9]

Soyons conscient que nous n’aiderons pas les mouvements de populations qui s’éloignent de guerres ou de conditions de vies désastreuses par les coups de menton et les effets de manche attenantes aux politiques démagogiques. Trump est en train de poursuivre ce que d’autres, dans l’indifférence générale, ont mis en place. Maintenant, en Europe des gouvernements, comme ceux de la Pologne ou de Hongrie, et peut être même d’autres, sont en train d’attendre leur moment pour suivre son exemple. Nous nous devons de dénoncer le président des Etats-Unis mais également les autres. Nous ne sommes pas exonéré de ne rien dire ni faire lorsque le président du Conseil européen, Donald Tusk, qui a su tancer le président des états Unis le 28 janvier suite à son décret, a annoncé ce 2 février, soit 4 jours après : « Maintenant il est temps de fermer la route allant de la Libye à l’Italie », « Je peux vous assurer a t-il précisé, que c’est à notre portée. Ce dont nous avons besoin est une détermination totale pour le faire ».[10]
Si, en matière de traitement des exilés , Trump se révèle être un vrai problème, incontestablement nos dirigeants le sont aussi. Soyons cohérent dans notre « oui » ou notre « non » sinon nous servons d’autres intérêts qui n’ont rien à voir avec le sujet de notre indignation ou de notre compassion.

[1] https://www.dhs.gov/news/2016/02/18/dhs-announces-further-travel-restrictions-visa-waiver-program
[2] http://abcnews.go.com/Blotter/al-qaeda-kentucky-us-dozens-terrorists-country-refugees/story?id=20931131
[3] http://edition.cnn.com/2015/11/16/world/paris-attacks-syrian-refugees-backlash/
[4] http://www.nbcnews.com/news/latino/deportations-fall-all-time-low-obama-took-office-n697156
[5] http://www.presidency.ucsb.edu/ws/?pid=51324
[6] https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F11144
[7] http://www.ambafrance-in.org/Procedure-d-obtention-d-un-visa-de
[8] Expression de Marcel Peyrouton, ministre de l’Intérieur de Pétain : « on à beaucoup parlé des camps de concentration dont le gouvernement aurait assuré l’ouverture et le peuplement. C’est inexact, c’est Monsieur Daladier qui en 1939 en fut le père. (..) Le Maréchal en hérita… ».
[9] Les clandestins de dieu p.108
[10] http://www.romandie.com/news/Migration-Il-est-temps-de-fermer-laxe-LibyeItalie-selon-Donald-Tusk/772083.rom


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