Le Président appelle de ses vœux une révision de la Constitution afin d’adapter notre démocratie aux nouvelles réalités des menaces qui pèsent sur la France. Or, le projet de loi constitutionnelle dite de « protection de la Nation » en cours d’études au Parlement prévoit des dispositions portant sur la déchéance de nationalité et la prorogation de l’état d’urgence, que nous jugeons inutiles et dangereuses.
Nous rappelons que des dispositions juridiques internationales encadrent les régimes d’exception. La conscience de chacune et chacun d’entre nous refuse que les droits démocratiques puissent basculer dans un autoritarisme sans contrôle. Nous craignons que des pratiques liberticides ne trahissent notre tradition humaniste et notre volonté du « vivre ensemble ». Le fait que le pouvoir administratif puisse être investi de capacités discrétionnaires constitue à l’évidence une menace de dérives antidémocratiques qui impliqueraient, par exemple, que le délit de faciès devienne de fait outil de police.
Notre Constitution, dont le préambule renvoie à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, est la pierre angulaire de notre République. Par son caractère pérenne, elle ne doit pas varier au gré des circonstances. Confondre ce qui est du ressort de la Constitution avec ce qui relève de la loi serait une erreur préjudiciable à la démocratie : nous rappelons que les articles 25 et 25-1 du Code civil autorisent déjà la déchéance de nationalité.
Nous faisons nôtre cette réflexion de Christiane Lazerges, présidente de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, publiée dans l’hebdomadaire Réforme [n°3636 - 10 décembre 2015] et nous pensons également « qu’il est très dangereux et malvenu de toucher à la Constitution sous le coup de l’émotion. Toute réforme constitutionnelle doit être pesée et réfléchie. [...] Et même à tête reposée, il n’est pas souhaitable de constitutionnaliser l’état d’urgence, c’est-à-dire une nouvelle exception à l’État de droit. Ce serait contraire à ce qu’est une Constitution. La Loi fondamentale qu’est la Constitution est là normalement pour poser des principes et des règles non dérogeables ».
Nous exprimons notre vive opposition à la constitutionnalisation de mesures organisant l’état d’urgence et étendant la procédure de déchéance de la nationalité. Nous demandons aux autorités morales et politiques de s’opposer fermement, par les moyens dont elles disposent, au projet de révision constitutionnelle actuellement débattu au Parlement.
Vendredi 04 Mars 2016
La Commune théologique du Sud parisien,
Membre du Mouvement du Christianisme social