Introduction
D’après Angola Press l’Angola a une dette morale envers le peuple cubain : durant les moments difficiles de son histoire, Cuba était disponible pour lutter aux côtés des Angolais et pour préserver l’intégrité territoriale du pays. C’est ce qu’a affirmé le directeur de la Ligue Angolaise d’Amitié et de Solidarité entre les Peuples (L.A.A.S.P.), Domingos Coelho da Cruz.
Le responsable a tenu ces propos, à Luanda, au cours d’une cérémonie à l’occasion du départ de la Délégation angolaise pour participer à la quatrième rencontre de solidarité envers Cuba, prévue à Addis-Abeba, en Éthiopie.
Selon lui l’amitié qui unit les deux pays est de longue date et se manifeste dans les moments cruciaux des deux peuples, depuis le début de la lutte pour la libération nationale.
Les rencontres africaines de solidarité envers Cuba ont commencé en 1995 en Afrique du Sud, avec la présence de Nelson Mandela, et se réalisent tous les deux ans. La dernière de ces rencontres s’est tenue en septembre 2010, en Angola. La délégation angolaise à la quatrième rencontre africaine de solidarité envers Cuba intégrait des membres des diverses couches sociales du pays.
Quand on parle de la dette morale, on parle de l’obligation morale de la reconnaissance envers autrui. Dans cette situation il y a celui qui s’est endetté, sur qui pèse la dette morale, et l’autre qui est le bienfaiteur. Pour sa part, le bienfaiteur attend souvent la reconnaissance. Cette reconnaissance dans certains cas peut enrichir le bienfaiteur. Dans cette situation, on se demande souvent : quand prend fin la dette morale ? Quand s’éteint-elle définitivement ? Il en est qui pensent qu’elle est réglée quand vous décidez de vous affranchir.
LA DETTE ET LA RECONNAISSANCE
Dans la première partie, nous allons examiner le lien entre la dette morale et la reconnaissance.
La reconnaissance est un sentiment (d’après les dictionnaires) qui incite à se considérer comme redevable envers la personne de qui on a reçu un bienfait. Exemple : témoigner sa reconnaissance
à quelqu’un. « Tout ce que je fais pour toi. » C’est ce qu’Élisabeth entend souvent lui dire sa maman, raconte Nicole Prieur . « J’ai entendu ma mère rabâcher pendant des années : « À cause de toi, je suis restée seule. Tu n’aurais jamais pu supporter qu’un homme prenne la place de ton père. Tu es ma seule raison de vivre. » Résultat, à trente-quatre ans, « j’habite seule avec maman, » comme dit la chanson d’Aznavour. Parfois, je me sens piégée, mais je n’ai pas le courage de l’abandonner, car elle ne m’a pas laissée tomber quand mon père est parti ! »
Élisabeth est redevable envers sa maman. « Tout ce que j’ai fait pour toi. » Élisabeth reconnaît et paie sa dette en restant avec sa maman. « Je n’ai pas le courage de l’abandonner. » Elle reste redevable, c’est-à-dire qu’elle est moralement débitrice envers sa maman, conformément aux
règles de la morale, sur le plan à la fois des sentiments et de la morale. La morale, c’est ce qui concerne les règles de conduite en usage dans une société. Ce qui est conforme à ces règles, admis comme honnête, juste, édifiant.
Élisabeth, du point de vue de la dette morale, est dans l’obligation morale de reconnaissance envers sa maman. Et c’est sans savoir jusqu’à quand elle doit rester dans cette situation d’endettée morale.
Des proverbes nous disent que la dette morale ne sert de rien :« Cent ans de chagrin ne payent pas un seul sou de dettes » ou « Les chagrins ne payent point les dettes », c’est-à-dire : se chagriner d’une dette ne sert à rien, il faut s’évertuer à la payer (Robert William). Quant à la fin de la dette morale, elle est éteinte quand vous décidez de vous affranchir de cette dette. Ainsi vous êtes quitte quand vous ressentez cet affranchissement. En revanche, il y a des fardeaux moraux qui durent toute la vie, on appelle cela des remords.
LA DETTE ET LA RESPONSABILITE
Ma deuxième partie traitera de la dette morale et de la responsabilité.
Il y a une responsabilité positive et une reconnaissance positive. Et d’autre part une responsabilité négative et une reconnaissance négative. Dans la responsabilité positive, on agit librement, et cette responsabilité est bienfaisante. Dans la responsabilité négative, on agit sous une contrainte qui peut être malfaisante.
L’exemple d’Élisabeth et sa mère nous éclaire. La mère d’Élisabeth lui parle à partir d’une perte, la mort de son mari, le père d’Élisabeth. Cette perte est reproduite ou maintenue parce que la mère d’Élisabeth ne veut pas épouser quelqu’un d’autre, pour le bien de sa fille.
Du coup, cette situation devient une dette pour Élisabeth. C’est une dette impossible à honorer parce qu’Élisabeth n’a rien demandé. Et pourtant elle est terriblement endettée. Elle est endettée vis-à-vis de sa mère, à l’égard de qui elle se sent une responsabilité, négative, parce qu’elle n’a pas eu le choix, et que ce qu’elle fait c’est d’imiter le sacrifice de sa mère, qui n’apporte pas grand-chose de bon. On voit que les rôles se sont inversés. La mère d’Élisabeth a refusé d’épouser ou de vivre avec quelqu’un d’autre pour protéger sa fille qui ne lui avait rien demandé. À trente-quatre ans, celle-ci ne peut pas quitter sa mère, « elle ne peut pas lui faire ça » parce qu’elle se croit responsable du malheur de sa mère. Cette responsabilité l’enchaîne, c’est un exemple clair d’une reconnaissance malfaisante.
Je précise les séquences de ce qui se passe ici : 1) Il y a la première perte : c’est la perte du mari, qui entraîne : 2) L’impossibilité de se marier ou de vivre avec quelqu’un d’autre. Mais cette séquence est interprétée par la mère comme une obligation envers son enfant, une dette morale ou un devoir moral. Or nous voyons qu’il s’agit d’un endettement de la mère vis-à-vis d’elle-même ! Troisième séquence : l’enfant, Élisabeth, est incapable de se marier, ou de vivre avec quelqu’un d’autre que sa mère. Mais Élisabeth se croit en devoir de reconnaissance à l’égard de sa maman, de sa mère. En réalité elle ne fait que reproduire ce qu’a fait sa mère. La transmission de la perte, la reproduction de l’incapacité : chaque fois ces situations sont trompeusement assumées comme un devoir moral, alors qu’elles ne sont ni des exemples de la responsabilité positive, ni des expressions de la reconnaissance bienfaisante.
Pourquoi je dis cela ? Parce que la mère d’Élisabeth rappelle à sa fille le sacrifice qu’elle a consenti pour elle ; et on voit que plus tard, Élisabeth à trente-quatre ans se sacrifie encore pour sa mère. Comment reconnaître la valeur positive de la dette morale ? C’est quand la personne bénéficiaire agit et parle à partir de la reconnaissance, sans que cela soit provoqué ou accompagné par la mémoire de la dette. Le rappel de la dette ou de ce qui la provoque ôte toute valeur positive à la dette morale. La dette morale est ce qui, subjectivement et en toute liberté, nous introduit à la gratitude. Elle ne peut pas être la conséquence d’un rappel extérieur de ce que nous devons aux autres.
LA DETTE ET LA GRATUITÉ
La relation entre la dette et la notion de gratuité n’est pas simple. Mais la gratuité elle-même a-t-elle toujours un sens évident ? « Y a-t-il un acte gratuit ? La générosité spontanée ne demande rien en échange. N’y a-t-il pas un intérêt poursuivi par un bénévole le plus dévoué ? Peut-il honnêtement assurer qu’il n’attend aucune gratification ? L’hypocrisie ou la mauvaise foi peuvent se cacher derrière celui qui prétend ne rien attendre en retour de son acte, agir pour rien en somme ! » Ce sont là des questions et suggestions que présente François Housset . Elles nous aident à entrevoir ce qui se joue entre la dette et la gratuité.
Comment est-ce que je me paie ?
Même lorsque l’acte généreux n’est suivi d’aucune rétribution, son auteur a pu trouver intérêt à l’accomplir. Sinon, comment aurait-il pu désirer l’accomplir ? Ce que l’on prend le plus souvent pour une absence de motifs n’est-il jamais qu’une ignorance de ces motifs ?
L’acte dit gratuit est intéressé.
Offrir, c’est miser. Payer un café, simplement, sans avant ni après, agir en pensant à l’intérêt d’un autre, c’est encore miser sur l’avantage d’être bon ; « ça revient toujours ». L’ascenseur marche, même celui qui prétend ne pas s’en soucier compte sur lui. La reconnaissance de l’autre est une bonne paie. Il est possible que finalement on ne soit pas payé de son geste : on peut mal placer son investissement, les « bonnes poires » s’y meurtrissent, donnant tout sans rien recevoir en retour .Mais que l’on en sorte gagnant ou perdant, on espère qu’on s’en trouvera récompensé. Le don lui-même est un pari optimiste.
La morale, elle, n’est pas optimiste. Elle veut ne pas récompenser. Elle exige que l’on agisse de façon désintéressée, non plus pour soi, ni même pour une personne précise, mais pour le bien. Agir moralement, c’est être contraint par la dette morale, imaginaire et symbolique, qui fait notre devoir envers nos parents et la société auxquels on doit tant, et pour lesquels on ne doit pas compter. On leur doit tant, qu’on leur doit tout. Il ne s’agit que de rendre, de rembourser, de renvoyer l’ascenseur. Tout devoir est une dette.
CONCLUSION
Nous avons tous des dettes morales. Leur complexité est telle, que souvent elles nous enchaînent. Pour nous en acquitter et reconquérir notre liberté, il nous faut prendre une décision.