Il y a eu ceux qui disaient, et qui disent encore : « Le communisme, c’est le goulag », ceux qui disaient et qui disent encore : « Le christianisme, c’est l’inquisition », et ceux qui disent : « l’Islam, c’est la terreur djihadiste ». Il y a ceux qui veulent faire passer cet extrêmisme meurtrier qu’est l’ultra-libéralisme pour la religion de la liberté et qui, sous prétexte de défendre nos libertés, les assassineront, alors que le « libéralisme », ça n’est assurément pas ni la Troïka et le coupes sombres qu’elle impose dans les budgets sociaux, ni le Patriot Act et ses atteintes aux libertés fondamentales.
Pourquoi, élevée à l’absolu du concept, de l’idée, de l’idéal ou de l’idole, l’expression de ce que nous avons de meilleur, l’espérance d’un monde où la recherche du bonheur est un droit, d’un monde où coulent le lait et le miel, d’un monde où règne la miséricorde et l’amour, pourquoi débouche-t-elle sur l’horreur et la mort ?
Mais pourquoi la peur du goulag, de l’inquisition ou du djihad nous sidèrent-elles au point que nous n’osons même plus espérer en un monde meilleur, plus prospère, plus juste et plus fraternel ? Pourquoi le totalitarisme par lequel nous sabordons les plus belles de nos espérances devrait-il déboucher sur un nihilisme qui n’en est que l’image inversée. Sommes-nous condamnés à osciller ainsi en permanence entre l’ange et la bête, entre le tout et le rien ?
Notre dignité ne réside pas dans le toujours plus et le tout tout de suite, qui finit toujours par nous ramener au rien et au jamais. Notre dignité se situe dans l’ordre du « presque » et du « un peu plus » élaborés et construits avec patience et persévérance.
Nous ne sommes pas impuissants, nous sommes seulement "presque" des dieux, bel et bien investis d’une puissance limitée et d’une créativité relative avec lesquelles nous pouvons faire advenir non pas un monde immédiatement idéal, mais pas à pas un monde un peu meilleur, un peu plus prospère, un peu plus juste et un peu plus fraternel
... juste un peu.