Je ne pouvais pas vivre autrement, c’était ça que je voulais vivre, et je ne voulais tout simplement pas le vivre en me cachant de devant Lui, sous les feuilles, comme autrefois Adam. S’il y a une chose qu’il a vraiment en abomination, le Vieux, depuis le temps, c’est bien ça.
Je L’aime bien, le Vieux. On n’est pas toujours d’accord, mais, depuis toujours, je L’aime. On peut causer avec Lui, et même parfois le faire changer d’avis. C’est un négociateur exigeant, Il n’est pas toujours tendre, mais Il aime ça, le Vieux, d’avoir en face de Lui quelqu’un d’autre avec qui causer.
Je n’avais pas vraiment besoin de son autorisation. D’ailleurs, je crois bien que ça l’ennuie, le Vieux, qu’on lui demande des autorisations pour un oui ou pour un non et qu’on soit toujours à attendre Ses ordres pour bouger le petit doigt. Ça le désole, même, qu’on ne prenne pas assez au sérieux la peine qu’il a prise de nous libérer.
Mais il fallait qu’on s’explique. C’était à moi de faire le premier pas. Après toutes les crises qu’Il m’avait déjà aidé à traverser, je Lui devais bien ça, au Vieux : qu’entre lui et moi, il n’y ait ni mépris, ni méprise.
Je savais bien que ça allait lui faire un choc. Déjà moi, il avait fallu que je m’y fasse, alors Lui...
La discussion a été serrée : Il a défendu sa position pied à pied ; Il n’avait pas envisagé cette possibilité dans Son projet initial : ça n’était pas vraiment ce qu’il avait voulu au départ, Lui. J’ai répondu que Ça avait du s’inventer tout seul. Mais c’était quand même avec les billes qu’Il nous avait confiées au départ. Ce « Ça » étrange qui s’était inventé tout seul, maintenant, était une part indissoluble de ce « je », qui, un peu tremblant, mais debout et droit devant Lui, disait « me voici ».
Que Sa création soit plus créative et plus diverse que ce qu’Il avait espéré au départ, Il avait de la peine à l’admettre, mais finalement, cette surprise n’était pas pour lui déplaire. Alors, à la fin Il m’a dit : « Va, Fils, c’est ta vie. Et si tu arrives à faire quelque chose de bien, de beau, de bon et de nouveau avec ça, Je te suis »
*Lévitique, chapitre 18, verset 22