— - Je rencontre Dieu tous les jours de ma vie qui n’ont rien d’extraordinaire --- cette phrase relevée de je ne sais plus où, vraiment je l’aime beaucoup parce qu’elle s’apparente à tous ces gens qui -font- du Christianisme Social en l’ignorant et que je croise chaque jour sans les connaître. Ces gens qui ne se revendiquent jamais du Seigneur dans cette charité et ce combat quotidien qu‘ils accomplissent sans se poser de question - le plus souvent ils ne franchissent guère les portes des lieux de culte autrement qu’aux grandes occasions familiales puis dans les deuils. Ces gens que je risque finir par regarder d’un drôle d’air presque à supposer qu’ils n’adoreraient pas Dieu autant que moi. Ces gens qui, tandis que je reste pantois, se précipitent pour relever cette aïeule trébuchant ou cet enfant brisé sans à aucun moment s’interroger sur la spiritualité de leur geste. Ces gens qui avec leurs vaines forces hurlent contre les inégalités jusqu’à en pleurer du sang et que j’imagine satisfaits - béats devant leur plat écran - alors que quelque part ces infamies dont ils sont témoins quand ce n’est victimes, creusent en silence des rides terribles dans leur cœur. Ces gens qui ne se plaindront même pas, juste lorsqu’ils n’en peuvent plus disent-ils par coté dans un murmure - Dieu n’aurait pas du - d’une voix mêlée de crainte et de doute mais de ce doute si respectueux qu’il en est encore plus humain parce qu’empreint de toute la fragilité de ce que nous sommes. Ces gens dont la réflexion dépend avant tout de leur existence, mais touchés par la Grâce ainsi que nous le sommes tous……………………
Au fil de ce dont j’ai la chance de me nourrir dans notre Commune de Bordeaux j’en viens à me questionner de savoir si à tant participer à réfléchir autour du Christianisme Social je ne cherche pas inconsciemment à vouloir exalter, en instrumentalisant ma Foi, les quelques bien modestes de mes gestes militants somme toute bien ordinaires. Portant ô combien souvent j’ai rapporté à mon fils celles - d’entre Ses paroles que j’ai entendu - tu auras Foi absolu en Moi sans t’interroger et tu ne te valoriseras jamais de Moi. Ne serais-je point enluminant ma vie sociale de ma Foi, d’être fier de ce dont en fait chacun bénéficie dès lors qu’il Est ? Ne serais-je point à me vanter d’un quelque chose en plus qui m’accorderait davantage le droit de m’insurger ou qui me confèrerait une autorité à écrire la rébellion ? Et si ma démarche était prétentieuse à trop vouloir dire : .. c‘est injuste… Dieu ne nous a pas Élevé pour vivre ainsi ! notre Foi ne nous autorise pas à cautionner ! Certes je ne veux rien de plus que hurler contre les injustices commises par d’autres humains qui d’ailleurs le plus souvent se prétendent eux aussi de Dieu. Si je ne craignais de prendre notre Seigneur à parti je dirais - qu’en penses-Tu ? Il nous renverrait sans doute les uns les autres, dos à dos. Je ressens le doute et surtout la peur de blasphémer à trop impliquer ma Foi dans ce qui n’est rien d’autre qu’un humanisme banal, voire une éducation - tout au plus la grâce d’être Debout.. Quelle légitimité ai-je pour partir en croisade contre les nouveaux mécréants du Monde ? …………………………
Bien sur le sens de notre vie est construit sur les Evangiles et nous voulons dire à chaque fois qu’il nous apparaît un dérapage - stop nous n’acceptons pas ! Nous avons sans doute raison de parler beaucoup en ces temps de malheur. Le bilan ne serait-ce que de notre pays aujourd’hui n’est-il pas de 12 millions de miséreux, 5 millions de privés d‘emploi, trois conflits armés, un démantèlement progressif de toutes ces valeurs sociales qui firent l’admiration du Monde au point que tous ceux de partout dans la détresse qui espéraient en nous, en notre tradition d’accueil et de fraternité chrétienne espèrent encore en la France. Ce Grand pays dont une partie aujourd’hui ne veut plus voir ses pauvres, ses malades chroniques, ses voyageurs, ses chômeurs, ses étrangers, ses homosexuels, ses réfugiés… ! Ce pays qui contribue à souiller cette planète que nous remettront en piètre état aux enfants de nos enfants et qui s’accapare la laïcité à des fins d’hégémonisme religieux. Nous voulons combattre tous ceux qui sont coupables de cette dégradation, de cette honte qu‘il nous font subir, qui n’entendent plus les autres, qui veulent tout posséder, qui ne respectent plus les Humains et qui se débarrassent de leurs responsabilités en invoquant une fatalité de crise qu’ils ont fabriqué. Nous voulons combattre parce que plus rien de ce qui est fait ne ressemble à notre force de vie guidée par les Evangiles. Mais notre démarche n’est-elle pas, de fait, terriblement politique ? Ne sommes nous pas entrain de faire-faire de la politique à notre Seigneur ? tel Don Camillo dont la cause était pourtant divergente de la notre mais qui y posait aussi la Parole de Dieu…………………………………
Il me traverse alors l’esprit, me - prétendant - du Christianisme Social de m’engager vers la mission prétentieuse d’inviter tous ces gens que je croise chaque jour sans les connaître qui ne savent peut être pas dire les déchirures, pas évoquer leur Foi ou dont leur réflexion fut contrariée ou faussée mais qui disposent de cette spontanéité à répondre à la détresse, à construire la solidarité dans l’urgence, à ces gens Debout qui ne parlent jamais de Christianisme Social, de les inviter à notre réflexion, car j’ai ce sentiment indicible que s’il faut des Témoins du Christianisme Social notre Seigneur pourrait bien exiger qu’ils soient parmi eux. Ainsi se bouscule dans ma tête que la raison de mon appartenance au Christianisme Social plutôt que de combattre les puissants qui fomentent les injustices pourrait-être d’aller de partout avec les plus humbles porter cette Parole avec eux ! Et je me plais à rêver qu’une belle vocation de notre Commune locale du Christianisme Social pourrait être de mettre tout en œuvre pour faire d’un débat prévu, trop cultivé trop convaincu trop poli, un grand - très grand - rassemblement Populaire autour de la seule volonté de rappeler que le Verbe est la Seule Lumière qui éclaire tout Homme en venant au Monde et que tant pis ou tant mieux si on ne possède pas les mots pourvu que les regards expriment nos espérances. Un grand rassemblement Populaire qui ne craindrait pas de peser sur la politique. De faire du Christianisme Social un mouvement perpétuel pacifique des - vies pas extraordinaires - montant des quartiers et des villages afin de lutter contre les mécréants avec comme seule arme sa détermination à leur dire : je suis autant que toi !.. et pour le reste qui s’en remettrait au Seigneur qui rappellera - et Lui seul - le moment venu, à ceux qui se sont écartés de sa parole - qu‘on ne joue pas contre Dieu ! Il pourrait bien alors être midi dans l’ordre social car nous aurions contribué à démanteler les portes……………………………
Mais voilà donc un rêve qui m’est bien pénible car pas sans sacrifice d’amour propre, aussi pour un temps je persisterai à deviser sereinement sur la confrontation de ma Foi Chrétienne avec l’environnement social économique politique et écologique de notre pays et… du monde entier.
– quand tu pries retire toi au fond de ta maison - Mathieu 6.5 -